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ALFRED MARIE JEANNE ET CLAUDE LISE


Rédigé le Lundi 23 Février 2009 à 17:26 |

Ce texte est l'avant-propos de l'ouvrage d'Edouard Delépine sur Camille Darsières.Ce texte analyse les relations entre les deux présidents des deux principales collectivités.


ALFRED MARIE JEANNE ET CLAUDE LISE
« Notre lutte n’est pas une lutte pour plus ou moins de subvention ni pour plus ou moins de franchises. C’est une lutte plus fondamentale. C’est une lutte pour la reconnaissance de la personnalité collective du peuple martiniquais ». Aimé Césaire



Le voilà subitement pressé de montrer sa détermination de faire aboutir dans l’urgence la réforme du statut de la Martinique. Depuis une bonne trentaine d’années qu’il a le sentiment que l’histoire lui mord la nuque, il n’en a jamais senti le souffle aussi brûlant que depuis qu’il a remplacé l’éphémère passionnaria qui, au temps des noces de Basse-terre, présidait le Conseil Régional de la Guadeloupe, madame Michaux Chevry, par le Président du Conseil Général de la Martinique, Claude Lise. S dont il voudrait faire son nouveau grégario de luxe,

Rarement le Président du Conseil Régional de la Martinique aura manifesté une telle arrogance, une telle insolence et, il faut bien le dire, un tel mépris à l’égard des élus du peuple, qu’à l’occasion du récent débat sur son nouveau projet bidon de révision du statut de la Martinique. Après cinq longues années de silence pendant lesquelles les deux présidents de nos deux collectivités ont eu dix occasions de convoquer le Congrès qu’ils peuvent présider à tour de rôle pendant six mois, ils ont subitement le feu au derrière.

Ils veulent donner l’impression de créer l’événement alors qu’ils le subissent et tâchent de nous l’imposer. Ils saisissent l’occasion que leur offre la boulimie réformatrice de notre omni-président, M. Sarkozy. Celui-ci a confié à son ancien patron, M. Balladur, devenu son premier serviteur, la haute mission qui hante depuis quarante ans la droite française : celle d’une réforme en profondeur des institutions françaises.

Elle en rêvait. La gauche l’a faite. Elle ne se pardonne pas d’avoir obligé le Général de Gaulle à se retirer sans l’avoir menée à bout et, encore moins, d’avoir laissé à François Mitterrand l’initiative et le bénéfice politiques de la seule grande réforme de la Ve République depuis l’élection du président au suffrage universel, près d’un demi-siècle : la décentralisation de 1982.
L’actuel projet de réforme de Sarkozy c’est la revanche posthume de la droite sur Mitterrand.

Il y a de ce point de vue une coïncidence cocasse entre cette volonté de revanche de la droite française et ce désir de vengeance du nouveau couple hétérozygote du Congrès sur le peuple martiniquais.

Le président du Congrès, président du Conseil Régional, et celui dont il rêve de faire son premier porteur d’eau, le Président du Conseil Général, sont désireux de se venger de l’humiliante défaite que leur ont infligée les électeurs martiniquais le 7 décembre 2003.
L’invraisemblable, ce n’est pas que Marie-Jeanne qui nous a habitué à ces foucades se place à l’ombre de la réforme institutionnelle voulue par l’omni-président Sarkozy, c’est que Claude Lise le suive sur ce terrain, lui qui a payé si cher sa tentative de trouver un langage commun avec nos amis socialistes entre 1999 et 2002.

Qu’il se trouve une presse de complaisance, de connivence et de révérence (Bourdieu) pour proclamer que ce pays vient de faire enfin, le 18 décembre, le premier pas vers la concrétisation de la pensée de Césaire, n’est pas pour nous surprendre.
J’ai toujours pensé que, si du vivant de Césaire on pouvait dire, comme pour le général de Gaulle, que « tout le monde a été, est ou sera césairiste », on aurait beaucoup de mal, après sa mort, à trouver un seul Martiniquais qui ne se proclame pas Césairiste et d’abord bien entendu, chez ceux qui l’auront le plus violemment combattu de son vivant.

Mais, tout de même, faire de l’enfermement de la Martinique dans l’article 74 de la constitution française, dépasse l’entendement !

Cinq ans après avoir affirmé que l’article 73 de cette même constitution, celui de l’identité législative, était le plus court chemin vers la prise de conscience nationale et, par la même occasion, le viatique le plus sûr vers l’accomplissement de la suprême pensée de Césaire : « la reconnaissance de la personnalité collective du peuple Martiniquais », les ex-champions de l’identité législative nous disent que ceux qui les ont crus sur parole étaient des imbéciles, qu’ils n’avaient rien compris à leur stratégie qui n’était d’ailleurs qu’une tactique pour tromper l’ennemi, que ce n’est pas l’identité législative du 73 mais la spécialité législative du 74 qui garantit le changement et la marche vers l’autonomie !

Et la presse applaudit ! Mieux, elle pleure sur notre échec. Elle compatit. Si ce n’est pas malheureux quand même un si grand parti…

« Que reste-t-il ? Nous seuls mais c’est assez » ?

Serge Letchimy l’avait fortement rappelé lors de sa première intervention, au nom du groupe des élus PPM au premier Congrès, le 12 juin 2001 : « Notre lutte n’est pas une lutte pour plus ou moins de subvention ni pour plus ou moins de franchises. C’est une lutte plus fondamentale. C’est une lutte pour la reconnaissance de la personnalité collective du peuple martiniquais ».

Cela m’avait paru si important que j’en ai fait pendant près de deux ans l’exergue de mon courriel hebdomadaire, « Le devoir de cohérence », d’abord en défense du projet de Loi d’Orientation pour l’Outre-Mer (LOOM), ensuite contre le projet de referendum-bidon du 7 décembre.

À mon avis, le PPM ne saurait encourager sous aucun prétexte, sous aucune forme, aucun mirage. Il ne cédera à aucun chantage. Il n’entretiendra aucune illusion quant à la possibilité de régler l’ensemble des problèmes martiniquais par la simple adoption d’un article plutôt que d’un autre de la constitution française, tels qu’ils sont rédigés aujourd’hui.

Le PPM a été battu sur cette question ? Et alors ?

C’est bien mal le connaître que d’imaginer qu’il en est abattu. Au contraire. Si même il était aussi isolé que semble l’affirmer une presse en vérité bien distraite, le PPM, sûr de lui et sûr de l’appui du peuple martiniquais, s’estimerait en droit de reprendre le mot de Césaire qui, dans une situation difficile, n’hésitait pas à citer le vers célèbre de Corneille : « Que reste-t-il ? Nous seuls, mais c’est assez ».

Mais nous ne sommes pas seuls et nous serons de moins en moins seuls. Je veux faire à ce sujet deux observations sur le choix du moment pour lancer le débat et sur la stratégie de nos réformateurs

1/ Sur le choix du moment. L’offensive institutionnelle-éclair d’aujourd’hui, aboutissant à coincer ce pays dans un contrat à durée indéterminée régi par une disposition constitutionnelle sur laquelle nous n’avons jamais été consulté, après dix heures de débats quasi-interrompus, ressemble plus à une partie de bonneteau (welto) conduite par un bonimenteur de foire qu’à une blitzkrieg conçue par un stratège audacieux.

D’un point de vue politique comme d’un point de vue psychologique, même pour l’esprit le mieux prévenu en faveur d’une évolution institutionnelle, le moment actuel peut difficilement être considéré comme le plus approprié, à l’heure où nous entrons dans une crise économique à la durée et aux conséquences imprévisibles.
Il révèle, au contraire, toute l’impréparation et toute l’incroyable légèreté, pour ne pas dire toute la fumisterie, de ceux qui l’ont choisi. Sauf évidemment à imaginer que ce CDI, dans l’article 74 de la constitution française, nous offre les meilleures garanties pour une traversée au moindre coût de la zone de tempête dans laquelle nous sommes entrés avec la crise économique et sociale sans précédent qui frappe le monde entier.

2/ Sur le choix stratégique des chevaux-légers de la réforme sarkoziste qui n’ose pas dire son nom. Je ne m’étendrai pas sur l’étrange logique de ces Clauzevitz de carnaval. Ils commencent par choisir l’enveloppe de leur CDI : l’article 74 de la constitution française. Ils verront après ce qu’ils peuvent mettre dedans. Si ça entre tant mieux.

Et si ça n’entre pas ? Si le pied s’avère plus grand que la chaussure ? On coupe le pied ?

Le pire est que notre cordonnier ne pense même pas à jeter un coup d’œil au rétroviseur pour admirer une dernière fois la sagesse du chef qui dénonçait hier, lors du débat de mars 1997, au Conseil Général, sur l’Assemblée unique « le carcan juridique étriqué de la constitution française », dans lequel, selon lui, le président de cette assemblée, Claude Lise, voulait enfermer le pays, « condamnant par avance toute émancipation du peuple Martiniquais ».

Mais, en vérité, ce n’est pas ce qui nous inquiète le plus en ce moment. Nous n’avons aucun doute sur la réponse que le peuple apportera aux faux monnayeurs du patriotisme relooké, modèle 2008.

Ce qui nous inquiète et nous intrigue, sans nous étonner, ce n’est pas le culot de Marie Jeanne dont chacun sait qu’il « est un bon cuisinier, c’est-à-dire un politique habile » (Césaire), c’est la béatitude orgasmique qu’on lit sur le visage de ses comparses, le mutisme plus éloquent que leurs paroles de ses complices et l’invraisemblable naïveté des futurs cocus.

C’est cette tentative de se faire passer aux yeux des ignorants, et même à ceux de quelques camarades qui le sont moins, pour un homme vertical, un ennemi du « zangzolage » et même depuis quelque temps pour le seul et authentique héritier du père de la nation Martiniquaise, qu’il dénonçait hier comme « un grand maître de la mystification et de la manipulation » . C’est la prétention ridicule de se poser en gardien vigilant de ce drapeau de la nation que le PPM aurait sali avant de le laisser tomber.

Je regrette de n’avoir pas été aux côtés de mon jeune camarade Séminor qui a fait à Marie-Jeanne la seule réponse que méritait son insolence : « OUI CHEF ! » Mais au lieu d’un OUI chef, sympathiquement gouailleur, j’aurais lancé un défi au provocateur : « NON CHEF ! PAS ÇA ! PAS VOUS ! PAS À NOUS ! »

Et j’aurais rappelé comment, en trois décennies, Alfred Marie-Jeanne n’a perdu aucune occasion de retarder la marche en avant de la Martinique, en attendant le moment où il croirait pouvoir gérer seul le destin de ce pays.

Je ne remonterai pas au temps où, sous la direction de Jean Maran, Maran l’Ancien, un homme pour lequel j’ai par ailleurs le plus grand respect, Alfred Marie-Jeanne sollicitait humblement l’investiture de la SFIO de Guy Mollet aux élections municipales de mars 1971.
Non sans avoir pris la précaution de se raser la barbe qu’il portait longue, de peur de passer pour un révolutionnaire, comme on en accusait alors tous ceux qui voyaient dans cette mode le symbole de la subversion et une marque de sympathie pour Fidel Castro.

Je veux m’en tenir ici à la question du statut, plus précisément à celle de l’Assemblée unique. Il a tellement parlé du « moratoire de Césaire » comme d’un abandon de la lutte pour l’autonomie qu’il en oublie – mais l’a-t-il jamais su - que c’est Césaire, à la tête d’une délégation d’élus de gauche des quatre DOM qui nous a fait faire le premier pas vers l’autonomie, en faisant adopter le principe d’une assemblée unique et d’une expérimentation de la décentralisation dans les DOM par le gouvernement socialiste avant sa mise en œuvre dans l’Hexagone.

Il est vrai qu’à l’époque, cela ne le gênait pas de se faire applaudir par Maran l’Ancien, l’adversaire le plus coriace de l’Assemblée unique.
Quand cette proposition est venue en discussion, avant même que le projet ne fût parvenu sur le bureau du Préfet, elle n’a pas été rejetée seulement par la droite. Elle a été ridiculisée par Alfred Marie Jeanne qui y a vu une manœuvre colonialiste insultante pour la Martinique. Il faut que les militants progressistes, et les militants de gauche d’une manière générale, se donnent la peine de lire le Procès-Verbal in extenso de la session du 30 août 1982 du Conseil Général.

Il y a là un florilège des sophismes mariejeannistes. En voici quelques morceaux choisis :

« La montagne colonialiste, sous la pression des événements, a accouché d’un souriceau …
« La Martinique reste, pour moi patriote martiniquais, économiquement exploitée, militairement occupée, politiquement dominée, culturellement opprimée
« …C’est une mystification, une de plus, une de trop, qui cherche à faire croire à la population martiniquaise qu’avec un président du Conseil Général et Régional devenu désormais organe exécutif, les problèmes économiques et sociaux, le chômage et l’émigration recevront comme par enchantement très satisfaisantes solutions….
« L’heure des compromis bâtards est dépassée. Dans un tel contexte de démission, de reniement, de pusillanimité, la question de l’indépendance reste plus que jamais à l’ordre du jour. C’est l’inévitable recours pour maîtriser le futur martiniquais. »

Plus d’un quart de siècle après, le temps des compromis bâtards serait -il revenu ? Le 74 aurait-il fait sauter le verrou carcéral de la constitution française dont notre éminent constitutionnaliste aurait subitement découvert le secret qu’il ignorait encore il y a onze ans ?

Lorsque, en mars 1997, sur proposition de notre Secrétaire Général, feu Camille Darsières†, député de la Martinique, et du sénateur PPM Claude Lise, Président du Conseil Général, un second débat sur l’Assemblée Unique est venu à l’Assemblée départementale, le conseiller général de Rivière-Pilote, devenu entre temps Vice-président du Conseil Régional qu’il dénonçait en 1982 comme un gadget ou une escroquerie colonialiste, n’a vu dans la convocation de l’assemblée que du
« tape à l’œil pour freiner l’élan populaire, une vaste mise en scène pour tenter de koubaré et de détourner à leur profit la volonté de changement populaire……
« À l’unanimité des présents, la Commission permanente [du Conseil Régional], dans sa réunion du mardi 11 mars [1997] courant, a décidé de ne pas engager le débat dans la précipitation et surtout dans l’impréparation…
« Je me refuse de participer à cette masturbation collective…
« Nous continuons en fait à réclamer, sous cape, une Assemblée à responsabilités limitées. Cela me révulse et me fait pitié à la fois…
« Cette étude se situe dans le carcan juridique étriqué de la constitution française, condamnant par avance toute émancipation du peuple martiniquais ».

Serait-il devenu lui aussi, parlant, en bon disciple d’Onan, le champion de ce « bate douce politique » qu’il dénonçait avec tant de vigueur chez ses adversaires, à la veille de la consultation du 7 décembre 2003 ?
Le voici encore plus empêtré aujourd’hui dans le 74 qu’il ne l’était hier dans le 73 ?

Avant d’en finir avec cette plénière du Conseil Général de mars 1997, je veux signaler, en passant, un détail qui permettra une comparaison édifiante avec l’attitude ignoble du Président du Congrès le 18 décembre dernier.
Un comportement de petit commandeur d’habitation s’adressant aux élus de la Martinique comme à un petit atelier de petite bande.
Une attitude encouragée, semble-t-il, par Claude Lise. Le Président du Congrès, malgré l’avis de deux autres parlementaires présents dans la salle, MM. Serge Larcher, sénateur, et Louis Joseph Manscour député, a obstinément et systématiquement refusé de mettre aux voix une motion présentée par le député-maire de Fort de France, Serge Letchimy, au nom du groupe PPM et démocrates du Congrès.

En mars 1997, le Conseiller général de Rivière Pilote qui n’était ni député, ni président du Conseil Régional, avait obtenu, sans aucune difficulté, du Président, alors PPM, du Conseil Général, le sénateur Claude Lise, avec l’appui, entre autres, de Serge Letchimy, conseiller général PPM de Fort-de-France, la mise au voix d’une motion qu’il jugeait d’une exceptionnelle importance.

Cette motion a recueilli UNE voix : la sienne . C’est dire l’intérêt qu’elle revêtait aux yeux de l’assemblée départementale. Le Président, PPM, de cette assemblée, en démocrate conséquent, qui avait, à l’époque, une certaine idée du fonctionnement d’une institution démocratique, avait très naturellement accédé à la demande de l’élu de Rivière Pilote.

L’incroyable est qu’aujourd’hui le Président d’un Congrès réunissant les principaux élus du pays (à l’exception des maires qui n’y sont pas représentés en tant que tels), puisse se comporter avec une telle goujaterie sans qu’aucun sifflet, ni claquement de pupitres, ni claquement de portes, ne sanctionne ce comportement qui lui vaut au contraire les félicitations d’une presse domestiquée qui n’est pas loin de voir dans cette muflerie une preuve de fermeté et de détermination.

J’ajoute enfin que, sous la présidence de Camille Darsières, le premier vice-président Louis Crusol, chargé de la rédaction du Règlement intérieur de l’Assemblée, après une large consultation de tous les groupes, avait fait adopter, en séance plénière, un règlement fixant dans le détail la procédure de présentation et de vote des motions non prévues à l’ordre du jour.
Pour respecter pleinement les droits de l’opposition, il avait été convenu que les motions seraient présentées en plénière, en commençant par celle qui serait la plus éloignée des questions inscrites à l’ordre du jour. Il n’est évidemment pas impossible que ce règlement intérieur ait été modifié.
Mais comment pourrait-on considérer comme un progrès le droit que s’arroge un Président de choisir entre les motions qui mériteraient de retenir l’attention de l’assemblée et celles qui ne le mériteraient pas ?

Mais le pire dans ce Congrès de la honte, c’est la conjuration inattendue de celui qui a combattu de toutes ses forces, il y neuf ans, pour rendre possible ce congrès et de celui qui a tout fait pour discréditer son action. .

Mais comment ne pas signaler que l’une des raisons de la publication de ce livre aujourd’hui, c’est le comportement de Claude Lise le 18 décembre 2008 ?
Après les résultats du 7 décembre 2003, j’avais volontairement limité la diffusion des textes publiés dans ce livre. J’avais même complètement interrompu la publication de mon courriel, le Devoir de Cohérence, pour éviter de jeter de l’huile sur le feu.
Quelques dirigeants du PPM savent combien et comment j’ai défendu, sans jamais céder d’un pouce, le Rapport Lise-Tamaya, de sa parution en juin 1999 (et même avant) jusqu’au mois de septembre 2003, Ce rapport a été, on le sait moins, à l’origine d’une brusque aggravation des tensions internes, perceptibles des 1995, mais devenues insupportables, à l’intérieur du parti.

Car en définitive, on l’aura compris, si j’ai considéré à l’époque que mon livre méritait d’être retravaillé pour tout ce qui concerne la redéfinition d’une ligne politique à la fois plus claire et plus soucieuse de rassembler que de polémiquer, c’est parce que j’ai longtemps nourri l’illusion de pouvoir recoller les morceaux d’un rêve brisé et les restes d’un espoir détourné.

Si nous nous n’avons pas pu infliger à la troika Girardin-Chevry-Marie-Jeanne une défaite aussi humiliante que celle que lui ont réservée les électeurs guadeloupéens, c’est parce que la gauche n’a pas été capable de choisir clairement son camp.

Nous n’avions pourtant aucune raison de douter. Dès la publication du Rapport Lise -Tamaya qui a été un excellent document de travail d’où est sortie finalement la Loi d’Orientation pour l’Outre-Mer, la droite, avec le concours de l’Élysée, n’a eu de cesse de la faire capoter. Je ne reviens pas sur ce que j’ai largement développé dans plusieurs textes de ce livre sur le pronunciamento de Basse-Terre.

Mais quand on voit aujourd’hui Claude Lise et Marie-Jeanne « unis comme deux pigeons qu’on ne saurait séparer même à grands coups de bâtons », pour reprendre l’image qu’affectionnaient jadis nos maoistes flamboyants de Chalvet lorsqu’ils n’étaient pas encore devenus les maoistes rampants du Plateau Roy, comment ne nous viendrait pas à l’esprit cette photo qui a fait le tour des grands journaux français ?

On y voit Alfred Marie-Jeanne au milieu d’un aréopage hilare d’indépendantistes brevetés du MIM, du PALIMA, du CNCP, de COMBAT OUVRIER, du GRS (probablement pas très fier de se trouver en cette compagnie) déchirant le rapport Lise-Tmaya, en jetant les morceaux dans une poubelle, sous l’œil complaisant des caméras des télévisions françaises et étrangères ?
Une image dont le premier vice-président du Conseil Régional, Daniel Marie-Sainte a vanté en termes dithyrambiques la force et l’exceptionnelle qualité médiatique. Un geste dont les Mimistes ont été si fiers qu’ils ont voulu faire voter, à l’initiative de Sylvain Bolinois, une motion de félicitation à leur président par une plénière du Conseil Régional.

Ce sont ces images qui me revenaient quand je m’efforçais de ne pas zapper devant mon téléviseur le 18 décembre dernier. Alors que tout en refusant de participer à la mascarade du Congrès de février 2002, j’étais resté scotché devant le petit écran, j’ai été incapable de suivre jusqu’au bout les dix heures de débats de ce congrès de la honte.

J’ai rarement pu tenir plus d’une demi-heure de suite. Mais chaque fois que j’ouvrais ma télé, je tombais sur une intervention qui me rappelait les positions défendues, il y a moins de dix ans par Alfred Marie-Jeanne qui confiait au journal Le Monde du 2 novembre 1999 que

« le rapport Lise-Tamaya était un rapport un rapport dérobade, étriqué à souhait, concocté pour freiner le déclin des suppôts inconditionnels du gouvernement, que c’est pour cela qu’il faut le combattre » ou, mieux, un rapport « dicté d’en haut, dans ses limites comme dans son contenu…

« que le Congrès est antidémocratique, en ce sens qu’il favorise une dérive alimentariste puisque c’est le Congrès qui jugera de l’opportunité d’interpeller le gouvernement français sur une possible évolution statutaire ».

Ce sont ces considérations qui me sont constamment revenues et qui m’ont décidé à publier finalement ce travail inachevé dont je mesure probablement autant que quiconque les insuffisances mais dont je suis persuadé qu’il peut aider à relancer utilement le débat sur le statut de la Martinique. Sans précipitation inutile.
Sans gesticulation médiatique.

C’est dire que nous ne sommes nullement impressionnés par les rodomontades du président du Congrès. Ce Congrès où il parade aujourd’hui avec tant d’arrogance ce n’est pas lui qui l’a inventé. Il a été créé sans lui, malgré lui et contre ses amis du NBH2.
Ceux-ci à l’époque n’ont pas hésité à demander au Conseil constitutionnel de considérer « l’institution d’un Congrès comme contraire au principe d’égalité entre les départements d’outre-mer en portant atteinte à l’unité du régime des départements ».
Mieux ou pire, ils dénonçaient la consultation de la population sur ce sujet comme une violation de la constitution.

Je voudrais enfin rappeler à propos de cette consultation populaire à laquelle vous paraissez tenir que nous, combien nous apprécions que vous soyez revenu de vos fanfaronnades des débuts de votre présidence du Conseil Régional.

À défaut de relire Césaire, avec le respect qu’il portait aux autres y compris aux indépendantistes dont il n’a jamais contesté le droit d’être pour l’indépendance, relisez-vous donc. Je me rappelle le sourire amusé de vos amis au temps de votre lune de miel avec vos anciens ennemis qui se sont faits vos complices avant de devenir vos dupes dans le NBH2..

Quand je leur montrais vos déclarations à Michel Tauriac, un journaliste de Paris Patch, par ailleurs proche du président de la République, Jacques Chirac, ils souriaient d’un air entendu. Je reproduis pour le lecteur tout ce passage dont la presse martiniquaise, généralement tellement friande de vos propos, a si peu parlé.

Paris-Match : « Beaucoup d’analystes pensent que le vote indépendantiste est un vote protestataire, poujadiste, populiste. Quel est d’après vous le pourcentage de ceux qui ont vraiment voté pour l’indépendance ? »
Alfred Marie-Jeanne : « Tous ceux qui ont voté pour moi sont pour l’indépendance. Or j’ai eu 65 % de voisx dans le sud Martinique. Il n’y a pas d’autre manière de juger la démocratie que par le vote. On prend les armes ou l’on vote. Donc le vote démontre à un moment donné l’état de conscience d’un pays. »…

P.M « Souhaitez-vous qu’un referendum soit organisé sur le statut de la Martinique ? Si oui, quel pourcentage de Martiniquais voterait pur l’indépendance aujourd’hui ? Vos opposants affirment que vous seriez balayé ».
A M-J.: Que les Français décident de faire un referendum tout de suite et ils verront.

P-M : Vous pensez vraiment que vous gagnerez ?
A. M-J. Nous remporterons ce referendum haut la main.

P-M : En êtes-vous si sûr ?
A. M-J : Nous l’emporterons haut la main. Le gouvernement n’a qu’à dissoudre l’assemblée régionale et décider ce referendum et vous verrez le score que nous obtiendrons. Je rappelle en passant que nous avons pratiquement le tiers de l’assemblée : 13 sièges sur 41.
Vous avez entendu ? Aucun parti en France n’a ce pourcentage à lui tout seul.

Rien ne traduit mieux la précarité et l’insincérité de vos convictions indépendantistes que l’incapacité où vous êtes d’esquisser le moindre geste qui pourrait indiquer que vous êtes en mesure de réaliser la moitié du quart de vos certitudes d’il y a dix ans.

Vous présidez le Conseil Régional depuis bientôt onze ans.
Vous avez avec vous non plus le tiers mais les 2/3 de l’Assemblée Régionale. Vous êtes le chef d’un groupe non pas de 13 mais de 28 conseillers sur 41.
Vous avez avec vous, dites-vous, 80 % des élus de ce pays. Qu’attendez-vous pour demander au gouvernement de lancer une consultation non pas sur l’article 73 ou sur l’article 74 de la constitution française, mais sur les trois courants politiques qui se partagent le pays, la départementalisation, l’autonomie ou l’indépendance ?

Seriez-vous moins sûr en 2009 qu’en 1999 de la réponse du pays ?

Depuis deux bonnes décennies, que vous êtes démocratiquement entrés au Conseil Régional, mais surtout depuis près de onze ans que vous présidez cette assemblée, que vous preniez pour un souriceau il y a 27 ans, vous avez pris l’habitude de traiter quasiment de viol de la conscience populaire le seul fait d’évoquer votre indépendantisme de jadis qui est de plus en plus un indépendantisme de la frime pour ne pas dire de la farce.

Les violeurs, à vos yeux, c’est vos traditionnels ennemis de la droite, transformés l’espace d’une mandature (1998-2003) en marchepieds avant de vous servir de serpillière. Mais c’est aussi c’est surtout vos anciens amis, ceux qui vous ont fait confiance aux élections législatives de 1973, en faisant de vous le porte drapeau de la parole au peuple avant que vous ne les trahissiez quatre ans plus tard aux sénatoriales de 1977.

Mais c’est peut être plus encore les anciens indépendantistes, revenus de leurs rêves et de leurs illusions, sans en rougir ni en éprouver aucun complexe.
Devenus ou redevenus autonomistes, non par la force des choses ni par résignation mais par conviction, ils sont allés vers le seul parti qui leur paraît capable de gagner le grand pari césairien de l’émancipation de l’homme martiniquais et de la reconnaissance de la personnalité collective du peuple martiniquais, non pas contre la France, mais dans la France et avec la France.

Aimé Césaire leur a ouvert les yeux en même temps que les portes de son parti. Ils n’ont jamais cru que l’autonomie était une Amérique qui attendait son Christophe Colomb. À travers toutes les péripéties d’une navigation difficile qui ressemble plus à une régate par gros temps qu’à une course automobile, ils sont prêts à tirer autant de bords qu’il faudra pour atteindre un but dont ils n’ont pas la naïveté de croire qu’il marquerait la fin de l’histoire du peuple martiniquais.

Mais ils n’acceptent de vous aucune leçon dans quelque domaine que ce soit. Le PPM se réjouit sans réserves de votre évolution des thèses assimilationnistes de la SFIO de Guy Mollet du début des années 1960 aux thèses césairiennes de l’autonomie au début des années 1970, de votre refus de participer aux élections législatives françaises, après notre échec commun de 1973, pendant plus d’une décennie de 1978 à 1988, à votre addiction, depuis 1993, à la course au Palais Bourbon, de votre mépris affiché de l’Europe depuis 1979 à vos pérégrinations et à celles de vos amis dans toutes les instances européennes, de la Commission des Iles de la CRPM (Conférence de Régions périphériques Maritimes) à la Conférence des RUP (Régions Ultra Périphériques) .

Le PPM respecte votre choix indépendantiste même si ce choix lui paraît de plus en plus comme une posture plutôt que comme une exigence.
Le PPM ne vous considère pas comme un ennemi mais comme un allié possible, et même comme un allié nécessaire mais nullement indispensable, en tout cas sans aucun privilège, compte tenu du poids réel dans le peuple martiniquais du mot d’ordre d’indépendance dont vous vous dites porteur.

Ou vous accepterez de peser dans une alliance pour le changement du statut de la Martinique ce que pèse ce mot d’ordre d’indépendance dans l’opinion martiniquaise, ou le PPM continuera de refuser le rôle, que vous paraissez vouloir faire jouer à vos alliés, de supplétifs d’une coalition invertébrée aux intentions mal définies dont le seul ciment est le ralliement à ces compromis bâtards que vous dénonciez autrefois, c’est-à-dire, l’acceptation de la confusion comme fondement de l’unité.

Le PPM, lui, est-il besoin de le dire, continuera à travailler inlassablement, le temps qui sera nécessaire, au rassemblement du plus grand nombre de Martiniquais autour d’un projet ambitieux qui ne sera pas forcément le sien, qui ne sera en tout cas pas seulement le sien, mais qui résultera d’un accord global conclu sur des base claire.






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