L’éducation en question Petite histoire des grandes vacances Daniel MOATTI
Chercheur associé au Laboratoire d’Anthropologie, Mémoire, Identité et Cognition sociale
Sujet d’actualité en ce mois d’août, « les grandes vacances » sont depuis la quatrième République au cœur du débat éducatif.
A l’origine, les vacances rimaient avec les principales manifestations religieuses du catholicisme, à l’exception des grandes vacances qui étaient liées aux activités rurales.
En effet, dès 1231, le pape Grégoire II accordait des vacances pour les travaux agricoles. Ces vacances, qui ne devaient pas excéder un mois, portaient le nom bien significatif de « vendanges ». En réalité, chaque établissement, chaque école appliquait divers systèmes de vacances.
L’ensemble des jours de congés scolaires indiscutablement ancré dans la vie religieuse suivait le calendrier des fêtes religieuses chrétiennes. Ces vacances avoisinaient 80 jours annuels. La Révolution et l’Empire édictèrent une réglementation unifiant les congés scolaires sur l’ensemble du territoire français.
Au cours du XIXe siècle, les congés scolaires vont peu à peu grignoter le temps de présence à l’école. Ainsi, en 1800, les seules vacances accordées commençaient le 5 août, pour se terminer le 20 septembre.
Ces vacances correspondaient à l’aide que les enfants devaient apporter lors des vendanges et de la moisson. Il faudra attendre 1860 pour que Napoléon III accorde 5 jours de vacances supplémentaires pour les fêtes de Pâques.
La République uniformise les congés scolaires des premier et second degrés (écoles, collèges et lycées) par un arrêté en date du 11 février 1939 :
Sujet d’actualité en ce mois d’août, « les grandes vacances » sont depuis la quatrième République au cœur du débat éducatif.
A l’origine, les vacances rimaient avec les principales manifestations religieuses du catholicisme, à l’exception des grandes vacances qui étaient liées aux activités rurales.
En effet, dès 1231, le pape Grégoire II accordait des vacances pour les travaux agricoles. Ces vacances, qui ne devaient pas excéder un mois, portaient le nom bien significatif de « vendanges ». En réalité, chaque établissement, chaque école appliquait divers systèmes de vacances.
L’ensemble des jours de congés scolaires indiscutablement ancré dans la vie religieuse suivait le calendrier des fêtes religieuses chrétiennes. Ces vacances avoisinaient 80 jours annuels. La Révolution et l’Empire édictèrent une réglementation unifiant les congés scolaires sur l’ensemble du territoire français.
Au cours du XIXe siècle, les congés scolaires vont peu à peu grignoter le temps de présence à l’école. Ainsi, en 1800, les seules vacances accordées commençaient le 5 août, pour se terminer le 20 septembre.
Ces vacances correspondaient à l’aide que les enfants devaient apporter lors des vendanges et de la moisson. Il faudra attendre 1860 pour que Napoléon III accorde 5 jours de vacances supplémentaires pour les fêtes de Pâques.
La République uniformise les congés scolaires des premier et second degrés (écoles, collèges et lycées) par un arrêté en date du 11 février 1939 :
Ces 10 semaines de congés accordées en été exauçaient les vœux des populations paysannes.
Ces 10 semaines de congés accordées en été exauçaient les vœux des populations paysannes. En 1950, 49% de la population française exerçait encore une profession rurale. La moisson et les vendanges s’étalaient d’août à la fin septembre et exigeaient la présence de nombreux bras, dont ceux des adolescents scolarisés.
Cependant, l’instauration des congés payés, la grande victoire du mouvement ouvrier de 1936, bouleverse complètement la belle ordonnance du calendrier scolaire.
En effet, à partir 1955, avec l’aisance économique accompagnant « les trente glorieuses », de très nombreuses familles salariées partent régulièrement en vacances dès le 1er juillet, désorganisant l’agencement de la fin de l’année scolaire située entre le 1er et le 15 juillet.
L’école doit suivre le mouvement amorcé. Dès 1960, la rentrée est avancée au 16 septembre et le début des grandes vacances est fixé au 28 juin en 1961. C’est alors que les grandes vacances atteignent leur maximum, 10 semaines de congé.
La population agricole étant encore importante, et la petite paysannerie ayant toujours besoin de l’aide des adolescents, la circulaire fixant le calendrier scolaire de l’année 1960/1961 précise qu’il est prévu des autorisations d’absences entre les 15 et 30 septembre accordées par l’Inspecteur d’académie, sur demande des personnes responsables, aux enfants ayant au moins douze ans qui sont occupés aux travaux agricoles (article 5, loi du 28 mars 1882), dans les départements viticoles compte tenu des travaux de vendanges (Circulaire du 19 septembre 1960).
Depuis 1981, les vacances se déchristianisent, les jours de congés liés au Mardi gras, deviennent les vacances d’hiver, celles de Pâques prennent la dénomination de vacances de printemps.
Sous l’impulsion des mouvements pédagogiques qui exigent un rééquilibrage des vacances scolaires, « les grandes vacances » devenues « les vacances d’été » vont être amoindries (2 semaines de moins) au profit des vacances de la Toussaint, 10 jours accordés de la fin octobre au 2 novembre, et d’hiver, 2 semaines reparties entre février et mars suivant les académies. Les deux semaines de vacances de septembre disparaissent définitivement avec l’extinction de la petite paysannerie française.
Cette nouvelle répartition suggérée au temps du ministère d’Alain Savary (1981/1984), repris par Jack Lang (1992/1993), tient compte, non seulement de l’intérêt des élèves, de la disparition du travail aux champs des adolescents, mais aussi des intérêts subtilement liés au tourisme.
En effet, les mois de juillet et d’août ne peuvent être entamés sans risques de protestation des corporations professionnelles ayant des activités touristiques d’été, d’où le maintien des 8 semaines de congés d’été. En outre, les vacances d’hiver, anciennement liées au Mardi gras, ont permis le développement des stations d’hiver.
En conclusion, « les grandes vacances » liées aux activités agricoles de la France du XIXe siècle et de la première partie du XXe siècle sont devenues « les vacances d’été » liées aux congés payés et aux activités touristiques depuis la seconde moitié du XXe siècle et en ce début du XXIe siècle.
Cette évolution sémantique accompagne en ce domaine, comme en d’autres, une profonde transformation sociologique.
Cependant, l’instauration des congés payés, la grande victoire du mouvement ouvrier de 1936, bouleverse complètement la belle ordonnance du calendrier scolaire.
En effet, à partir 1955, avec l’aisance économique accompagnant « les trente glorieuses », de très nombreuses familles salariées partent régulièrement en vacances dès le 1er juillet, désorganisant l’agencement de la fin de l’année scolaire située entre le 1er et le 15 juillet.
L’école doit suivre le mouvement amorcé. Dès 1960, la rentrée est avancée au 16 septembre et le début des grandes vacances est fixé au 28 juin en 1961. C’est alors que les grandes vacances atteignent leur maximum, 10 semaines de congé.
La population agricole étant encore importante, et la petite paysannerie ayant toujours besoin de l’aide des adolescents, la circulaire fixant le calendrier scolaire de l’année 1960/1961 précise qu’il est prévu des autorisations d’absences entre les 15 et 30 septembre accordées par l’Inspecteur d’académie, sur demande des personnes responsables, aux enfants ayant au moins douze ans qui sont occupés aux travaux agricoles (article 5, loi du 28 mars 1882), dans les départements viticoles compte tenu des travaux de vendanges (Circulaire du 19 septembre 1960).
Depuis 1981, les vacances se déchristianisent, les jours de congés liés au Mardi gras, deviennent les vacances d’hiver, celles de Pâques prennent la dénomination de vacances de printemps.
Sous l’impulsion des mouvements pédagogiques qui exigent un rééquilibrage des vacances scolaires, « les grandes vacances » devenues « les vacances d’été » vont être amoindries (2 semaines de moins) au profit des vacances de la Toussaint, 10 jours accordés de la fin octobre au 2 novembre, et d’hiver, 2 semaines reparties entre février et mars suivant les académies. Les deux semaines de vacances de septembre disparaissent définitivement avec l’extinction de la petite paysannerie française.
Cette nouvelle répartition suggérée au temps du ministère d’Alain Savary (1981/1984), repris par Jack Lang (1992/1993), tient compte, non seulement de l’intérêt des élèves, de la disparition du travail aux champs des adolescents, mais aussi des intérêts subtilement liés au tourisme.
En effet, les mois de juillet et d’août ne peuvent être entamés sans risques de protestation des corporations professionnelles ayant des activités touristiques d’été, d’où le maintien des 8 semaines de congés d’été. En outre, les vacances d’hiver, anciennement liées au Mardi gras, ont permis le développement des stations d’hiver.
En conclusion, « les grandes vacances » liées aux activités agricoles de la France du XIXe siècle et de la première partie du XXe siècle sont devenues « les vacances d’été » liées aux congés payés et aux activités touristiques depuis la seconde moitié du XXe siècle et en ce début du XXIe siècle.
Cette évolution sémantique accompagne en ce domaine, comme en d’autres, une profonde transformation sociologique.