LES VAINQUEURS VAINCUS ? CE N’EST PAS LA RAISON C’EST LA PEUR DES BOYCOTTEURS QUI L’A EMPORTÉ


Rédigé le Jeudi 21 Octobre 2010 à 12:11 |

Par Edouard de Lépine :Contrairement à ce qu’affirme le président du Conseil Général ce n’est pas la raison qui l’a emporté dans la décision du Président du Conseil Régional de renoncer à convoquer le Congrès. C’est la peur des boycotteurs de voir s’ouvrir un débat public sur les thèmes arrêtés d’un commun accord par la Commission Mixte mise en place, le 1er juin dernier par les exécutifs des deux collectivités.


Ceux qui ont refusé de participer au Congrès portent l’entière responsabilité de l’annulation de la convocation lancée il y a plus de quinze jours par le président en exercice de ce Congrès.
Ce n’est pas l’un des moindres paradoxes des responsables de ce boycott que de voir l’accueil chaleureux réservé à cette décision par ceux qui la veille accusaient Serge Letchimy de déni de démocratie, parce qu’il voulait rendre compte à l’ensemble des 85 élus régionaux et généraux et à l’opinion publique des travaux réalisés par une Commission mixte de 14 élus des deux assemblées et qui aujourd’hui l’applaudissent parce qu’il accepte de violer le droit des élus à un libre débat et et celui de leurs électeurs à une information directe et complète.

Ce n’est évidemment pas Letchimy qui a mis en place tout seul une Commission mixte chargée d’étudier et de faire des propositions sur dix thèmes précis : 1/ le nom de la collectivité 2/ le nombre d’élus 3/ la gouvernance de l’assemblée 4/ le mode de scrutin 5/ les compétences de la collectivité 6/ les habilitations 7/ les ressources de la collectivité 8/ La fusion des administrations 9/ la date de mise en place de la collectivité 10/ les instances consultatives.

Qu’attendaient donc les boycotteurs des dix séances de travail auxquelles ils ont participé ? Ils pouvaient admettre de discuter de questions qu’ils jugent importantes entre un petit nombre de privilégiés, à l’abri d’oreilles indiscrètes et avec l’aide d’un collège d’experts non élus ; mais ne sauraient souffrir que les résultats de leurs travaux soient portés à la connaissance de l’ensemble des élus et à l’appréciation de l’opinion c’est-à-dire de ceux qui les ont envoyés siéger en leur nom au Conseil Général et au Conseil Régional ?

Allons donc !

Autant on aurait compris que des élus mécontents des conditions de la convocation du Congrès en demandent le renvoi à une date ultérieure, autant les arguments développés par les boycotteurs paraissent inacceptables.
D’autant plus lamentables que ce n’est pas Letchimy, ni la majorité du conseil régional ni, à plus forte raison, le PPM qui souhaitent aller le plus vite possible le plus loin possible. C’est les boycotteurs qui veulent accélérer la réforme et mettre en place les nouvelles institutions avant la date prévue pour la réforme territoriale en France (2014).

Les mauvais langues disent que Claude Lise, encore moins sûr de retrouver son fauteuil de l’Avenue des Caraïbes, après le renouvellement de la moitié des élus du Conseil général de mars 2011, que Sarkozy de retrouver le sien à l’Élysée après les présidentielles de mai 2012, veut aller encore plus vite que le Président.

En fait le Président du Conseil Général a moins peur d’affronter ses collègues que l’opinion publique. Il craint manifestement moins les caméras de télévision balayant des rangées de sièges vides, avec les noms des absents, que l’objectif braqué sur son visage pendant qu’il serait en train de prononcer l’oraison funèbre du 74 dont il avait fait le panégyrique pendant près de deux ans et l’apologie du 73 qu’il encense aujourd’hui après l’avoir enterré et tant craché dessus depuis le 18 décembre 2008.

Il reste que rien n’obligeait le récent vainqueur des dernières consultations à céder devant l’irresponsabilité et l’insolence du principal vaincu de ces consultations. Il faut un incroyable culot au président du Conseil Général comme à l’ancien président du Conseil Régional sensés mieux connaître que le nouveau, les procédures de convocation du Congrès, pour accepter en juin la création d’une commission ad hoc pour préparer le congrès et prétendre trois mois plus tard que le Congrès n’avait pas à prendre connaissance des résultats des travaux menés en son nom.
Pire, que le Congrès n’avait d’ailleurs rien à dire de plus que ce que le peuple avait déjà dit le 24 janvier en se prononçant sans ambiguïté et une fois pour toutes pour l’application de l’article 73 de la constitution française. Point. Barre.

Kimafoutiésa !
Nombre d’élus ?
Mode de scrutin ?
Ressources ?
Adaptations ?
Habilitations ?

La création de la Commission c’était donc du bidon ? de la poudre aux yeux ?
Pour donner le change à qui ?
Pour faire croire qu’on acceptait de jouer le jeu, qu’on avait fini par faire son deuil du 74 et qu’on était prêt à faire contre mauvaise fortune bon cœur en se contentant d’endormir les vainqueurs ?

Le pire c’est qu’ils y ont réussi. Car enfin, en quoi maintenir la convocation du Congrès ce serait ajouter la division à la division ? La division existait avant la convocation du Congrès. Le maintien du Congrès n’ajoutait pas de la division à la division, comme Letchimy a semblé le craindre.
Son annulation ajoute la confusion et, plus grave, l’humiliation à la division et au désaveu des vainqueurs par les vaincus du suffrage universel.

Mais cette annulation est peut-être un mal pour un bien. Il n’y avait, nous l’avons dit, aucune raison de céder à l’impatience du Président de la République d’aller le plus vite possible et le plus loin possible c’est-à-dire avant les présidentielles de 2012.

Il n’y avait surtout aucune raison majeure de convoquer le congrès 5 mois avant le renouvellement de la moitié du Conseil Général en mars 2011, quels que doivent être les résultats de cette consultation. Sauf à considérer que ces élections qui seront les dernières pour la désignation des derniers conseillers généraux de la Martinique, n’ont aucune importance, que ce sont des élections bidon, qu’en mars le vin sera tiré et qu’il faudra le boire.

Le report du Congrès qu’il faudra bien convoquer à un moment ou à un autre pour se prononcer sur les questions qui n’auront pas été tranchées par le parlement, sans l’avis des élus martiniquais, offre aux partisans d’un changement même mineur dans la gestion des affaires de ce pays une nouvelle chance de porter le débat dans la presse, dans la rue, dans les assemblées de quartiers, dans les conseils municipaux, dans les associations et jusque dans les partis dont je ne suis pas sûr qu’ils aient joué pleinement le rôle qu’on en pouvait attendre dans un débat qui n’intéresse pas que les élus et les experts mais la nation toute entière.




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