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LE PARICIDE LA GUERRE CIVILE EN LYBIE Par Robert BIBEAU


Rédigé le Samedi 5 Mars 2011 à 16:19 |

Rédact Naïf LUPOURVOUS Le territoire libyen est immense (1,8 M. km2, soit trois fois la France) et sa population, clairsemée (6,8 millions d’habitants), est très urbanisée (86 % de citadins et 14% de ruraux). Ce peuple jeune a un taux de fécondité parmi les plus élevé au monde et près de la moitié de la population a moins de 15 ans


LE PARICIDE LA GUERRE CIVILE EN LYBIE Par  Robert BIBEAU
Les tribus berbères originaires de Tripolitaine, du Fezzan et de Cyrénaïque ont été arabisées, islamisées, urbanisées et alphabétisées (89%), puis industrialisées (industrie : 50% du PNB avec le pétrole). Le pétrole constitue l’essentiel des exportations du pays alors que les produits de consommation sont tous importés de l’étranger.

La Libye est donc un pays très dépendant de l’extérieur, vulnérable et fortement soumis aux pressions économiques, financières, diplomatiques et politiques internationales. Qui est dépendant des puissances impérialistes ne saurait prétendre soutenir une politique national indépendante et souveraine. Aussi les déclarations tonitruantes de Kadhafi ne sont-elles que les bouffonneries d’un polichinelle pathétique.

Le chômage y est endémique (30%) comme dans le reste de l’Afrique. Même si le revenu moyen par habitant (14 000 dollars) est le plus élevé d’Afrique du Nord les disparités régionales sont importantes. Comme ces disparités épousent la géographie de la répartition des tribus ancestrales, la présente insurrection armée se marie avec le ressentiment populaire, qui se confond quant à lui avec la carte de la distribution très inégale de la richesse. C’est ce qui faisait dire aux insurgés de Tobrouk que Kadhafi de Tripolitaine n’avait jamais rien fait pour le peuple de Cyrénaïque depuis le roi Idris Ier, qu’ils auraient aimé ressusciter.

A Tobrouk, dans l’est, une manifestation a réuni un millier de personnes. Les manifestants brandissaient des drapeaux de la monarchie libyenne du roi Idris Senoussi qui s’est imposé comme un symbole de l’insurrection. « Ils n’ont jamais rien fait pour nous, dans l’Est : tout ce que vous pouvez voir a été construit par le roi Idris, renversé par Kadhafi en 1969 », assure Khaled Abdul Aziz, un sergent de police.

L’insurrection armée

L’insurrection libyenne a ceci de particulier que depuis le début des hostilités de nombreux mutins sont armés, ils savent manier les armes lourdes et ils ont infligé des pertes importantes aux forces de l’ordre. Ce n’est pas usuel, dans un pays où le service militaire n’est pas obligatoire et dont l’armée est fragile. Les hommes des tribus sont armés, mais dans les zones rurales seulement, ce n’est pas le cas des gens des villes, qui forment tout de même l’immense majorité de la population libyenne.

Au début du soulèvement, les défections dans l’armée ont été minimes, si bien que ce retournement des armes ne peut expliquer les premiers revers du clan Kadhafi. Il n’est pas non plus concevable que quelques milliers de citoyens révoltés inexpérimentés se soient emparés des équipements dans les casernes et aient spontanément pu tuer tant de soldats et de policiers ; ni qu’ils aient connu instinctivement les techniques de camouflage et de guérilla urbaine. En effet, le nombre de victimes est relativement peu élevé après plus d’une semaine de « carnage » aérien et terrestre. Tout cela ne colle pas : on nous cache tout, on ne nous dit rien… Ou bien, alors, on nous ment.

Le foyer de la guerre civile trouve son origine à Benghazi qui brade le pétrole du pays à l’Europe et qui en est à sa troisième insurrection en 15 ans (1996, 2006 et 2011), alors que Tripoli est restée fidèle au « Guide de la révolution » de la Jamahiriya arabe libyenne. Depuis son accession au pouvoir en 1969, Kadhafi a mis sur pied une structure de gouvernance qui s’appuie en partie sur les vieilles organisations tribales et en partie sur les Comités révolutionnaires. Ceux-ci, avec le temps, ont été peu à peu dépouillés de leur pouvoir, particulièrement depuis que le « Guide révolutionnaire » a été réhabilité par George W. Bush, lequel a mis fin au boycott de la Libye. En effet, les entreprises américaines étaient les seules à respecter l’embargo alors que les entreprises européennes et chinoises investissaient massivement au pays du « terroriste » devenu soudainement fréquentable. Les firmes BP, Royal Dutch Shell, Total, Basf, Statoil, Rapsol et Gazprom exploitent aujourd’hui le pétrole libyen (1,8 millions de barils par jour, troisième producteur d’Afrique).

Un règlement de compte entre clans est toujours sanglant et n’a jamais rien d’attrayant, mais cela a bien peu à voir avec une révolution populaire. La révolte libyenne est une guerre civile atroce comme la Somalie, le Liban, le Soudan et l’Afghanistan en ont connues. Pas de héros, ni d’un côté, ni de l’autre, seulement des paumés pris en tenaille entre les deux camps. Tous les clans sont coupables d’exactions et tous les clans embauchent des mercenaires. Pourquoi soutenir un clan meurtrier plutôt qu’un autre ? Dans une alliance tribale, il y a des rituels et des traditions, une façon de transmettre le pouvoir d’un chef à un autre et, surtout, des principes dans l’attribution du butin des rapines. Ces dernières années, Mouammar Kadhafi n’a respecté aucune de ces règles, aucune de ces traditions. Il a monopolisé le fruit du pillage de l’État entre les mains de sa famille et de sa tribu, il a spolié les autres tribus. La réponse, soutenue en sous-main, est venue des hauts-plateaux : les tribus flouées sont descendues des versants et sont venues à Tripoli lui faire payer le prix de sa cupidité et de sa duplicité, faisant la jonction avec toute une jeune génération qui, depuis sa naissance, n’a connu aucune autre figure politique que l’homme du « Livre vert » et dont le ras-le-bol est devenu évident.

Faut-il choisir le clan de Mouammar Kadhafi, ou celui de son concurrent Al-Houni, son ancien compagnon de révolte, ou encore le clan de l’un ou l’autre de ses fils ? De la façon dont le conflit évolue, les insurgés désigneront eux-mêmes le prochain dictateur libyen. Il n’est même pas certain qu’ils le feront entériner par scrutin. Ils voudront d’abord supputer les chances du « désigné » de gagner l’élection truquée. Si leur challenger risque de perdre au vote, il n’y aura pas plus d’élection qu’il n’y en a eu au cours des quarante-deux dernières années.

Intervention – invasion ?

Depuis Kouchner, et même avant, les Droits de l’homme ont toujours servi à préparer le terrain pour les envahisseurs. Avant-hier, les États-Unis sont allés libérer les Irakiens de la poigne de Saddam Hussein-le-sanguinaire ; un million de morts plus tard, ils quittent l’Irak ravagé. Hier, ils sont allés libérer les femmes afghanes des Talibans. Des centaines de milliers de cadavres (de femmes notamment) plus tard, ils négocient leur retrait d’Afghanistan avec les Talibans « terroristes modérés ».

Aujourd’hui, un consortium étranger formé de Human Rights Watch, d’Amnesty International, de la Fédération internationale des ligues de Droits de l’Homme (FIDH) et de l’ONG Human Rights Solidarity réclame une intervention militaire pour assurer la victoire d’un des clans d’insurgés. Pour ce faire, ils répandent des histoires d’horreur à propos des seuls mercenaires de Kadhafi, semblables à celles qui ont été diffusées à propos d’incubateurs débranchés par les hordes barbares de Saddam (sic) au Koweït, ou encore ces fadaises à propos de charniers géants découverts à Timiþoara puis disparus après l’exécution de Ceauþescu en Roumanie (re-sic).

Mais il est peu probable que l’OTAN envoie un contingent de troupier en Libye parce que, d’une part, elle en prend déjà plein la gueule en Afghanistan, où tous les alliés des Américains ne songent qu’à lever le camp et à rentrer chez eux. D’autre part, une intervention des soldats de l’OTAN ne servirait qu’à mettre le pays sous tutelle américaine. Les puissances européennes membres de l’OTAN se sont déjà fait arnaquer en Irak ; elles ont contribué à l’écrasement de Saddam et à la destruction de la nation irakienne pour se retrouver exclues de la saignée du pays, par la suite. La France, qui avait une position dominante dans l’Irak de Hussein, en conserve un goût amer.

Depuis et avant que le gouvernement Bush ait réhabilité Kadhafi « le voyou », ce sont surtout les Européens qui ont profité de la manne libyenne. Les multinationales américaines sont arrivées sur le tard, si bien que la Libye exporte 85 % de son pétrole vers l’Europe et le reste vers la Chine, le tout, sans transiter aucunement par les entreprises américaines : une situation inacceptable, pour la superpuissance décadente. Les concurrents des USA n’ont pas à être affranchies de la puissance de tutelle, pense Obama.

Les États-Unis souhaiteraient peut-être une intervention aérienne de l’OTAN (visant à empêcher le clan Kadhafi d’utiliser ses avions de façon à faire basculer le rapport de force militaire en faveur des clans insurgés), si les mercenaires rebelles ne parviennent pas à renverser le « Guide », mais leurs alliés européens dans l’OTAN n’accepteront pas de fournir de contingents et préfèreront une intervention sous le haut-patronage de l’ONU, de façon à conserver le contrôle du pays après l’intervention militaire étrangère.

En ce qui a trait à un hypothétique contingent africain sous bannière de l’OTAN, il est trop tôt pour y songer, le traité de coopération OTAN-Union Africaine n’est pas encore ratifié et le Commandement Africa (AfriCom), le principal instrument de pénétration États-unienne sur le continent, n’est pas prêt pour une telle intervention. Rien à craindre, les soldats de l’OTAN n’iront pas mourir à Tobrouk sur les tombes de l’Afrika Corps.

La Grande-Bretagne, ancienne puissance colonisatrice de l’Égypte, maraude en eau trouble ces jours-ci et il n’est pas impossible que le Premier ministre Cameron suggère à l’État-major toujours en place de l’ex-dictateur Moubarak une intervention « humanitaire » musclée en sol libyen afin de sauver la mise Britannique.

Le ver est dans le fruit

Le premier fils du second mariage de Kadhafi, Saïf al-Islam, aujourd’hui en disgrâce mais qui fut un temps l’héritier putatif du « Guide de la révolution », a mené les négociations pour la ruée tardive des multinationales américaines dans le pays. C’est lui qui a proposé un train de réformes de ce qui tient lieu de constitution afin de le rendre plus conforme au mode de gouvernance occidental et de départir les Comités populaires de toutes leurs prérogatives. Il y a quelque temps, il a ordonné la libération de centaines d’islamistes des geôles libyennes, en préparation de l’insurrection qu’il manigançait. C’est l’homme lige des Occidentaux, mais il n’est probablement pas leur préféré, tant il est difficile de prévoir la réaction de la population libyenne à la résurrection de ce poltron, ce qui expliquerait l’atermoiement des puissances impérialistes quant à une intervention en faveur de l’une ou de l’autre faction dans l’insurrection clanique armée en cours au pays du « Livre Vert ».

Le peuple libyen et la classe ouvrière libyenne abusés par cet écheveau meurtrier, victimes collatérales de cet affrontement tribal sanglant, parviendront-t-ils à tirer leur épingle du jeu et à renvoyer dos à dos tous ces prétendants illégitimes et à défendre leurs intérêts propres au milieu de cette catastrophe ? Il le faudrait bien, pourtant.

Robert BIBEAU

Source legrandsoir



INTERNATIONAL


1.Posté par toto le 10/03/2011 10:25
Kadhafi menace de balancer "un grave secret" sur la campagne de Sarkozy en 2007
10/03/2011 à 14h47 - mis à jour le 10/03/2011 à 15h41 | 1316 vues | 25 réactions


Ces déclarations interviennent au moment où le président de la République reconnaît officiellement l'opposition libyenne.


Mouammar Kadhafi et Nicolas Sarkozy. | Montage Le Post

La tension diplomatique entre la France et la Libye monte d'un cran.

Le timing semble bien calculé. Au moment où Nicolas Sarkozy reconnaît officiellement l'opposition libyenne, le régime de Kadhafi affirme, via son agence officielle Jana, que la révélation d'un "grave secret" pourrait entraîner la chute du président français.

Ces révélations du régime Kadhafi seraient liées au financement de la campagne électorale de Nicolas Sarkozy en 2007, selon Jana. Cette annonce du régime libyen a été reprise par la télévision officielle.

La menace de Kadhafi intervient quelques heures après la rencontre prévue jeudi matin entre Nicolas Sarkozy et le Conseil national de transition (CNT) libyen, qui regroupe l'opposition au régime du colonel Kadhafi. Une rencontre au cours de laquelle la France a reconnu la résistance libyenne comme "seul représentant légitime du peuple."

Alors que Nicolas Sarkozy proposerait à l'UE des frappes aériennes ciblées en Libye, le dirigeant libyen envisage de rompre ses relations diplomatiques avec la France.

Qu'est-il ressorti de la rencontre entre Nicolas Sarkozy et les trois représentants de l'opposition libyenne ?

La France, après les couacs dans sa gestion des crises tunisienne et égyptienne, se vante d'être la première à reconnaître l'opposition armée au régime du colonel Kadhafi.

L'opposition libyenne sera donc l'interlocuteur officiel de la France dans le pays. C'est dans ce cadre que la France envisage d'envoyer un ambassadeur à Benghazi, le siège de la contestation au colonel Kadhafi.

2.Posté par machin le 20/03/2011 15:28
Le film hollywoodien commence.

Plan large sur l'horizon au dessus de la mer, des soldats devant leur écran radar vide, une voix arabe qui hurle: ils arrivent, donnez l'alerte!



Au générique, on a eu droit aux mentions habituelles:



Barak Obama Company Presents

a Usa Wars For All Entertainment Production,

Barak Obama,

Hillary Clinton,

Nicolas Sarkozy, David Cameron,


and, Muhamar Khadafi as The Fucking Enemy

in Carpet bombing in Tripoli"



Les télés s'en donnent à coeur joie, l'économie médiatique, plutôt morose va repartir.

Il y a même des journalistes de gauche pour dire "Merci" à Sarkozy. On les comprend.



Il y a à gauche des agitateurs d'idées moralisantes qui se prennent pour la conscience de la France et même du monde. Le monde civilisé, c'est celui qui veut leur ressembler, forcément !



L'opération est saluée par presque tout le monde dans l'opinion. Fini, les gaffes de communication, les petites phrases mal ou trop bien interprétées. C'est l'armée qui assure la mise en scène médiatique. On évite de dire que l'opération est sous commandement américain, on met en avant l'action du Président Sarkozy sans qui rien ne serait arrivé, on passe en boucle les images de Rafales et de Mirages décollant depuis la base de St-Dizier, et le tour est joué. On espère que les Rafales se vendront mieux. On espère que l'UMP ne se prendra as une déculottée aux Cantonnales, on espère que la côte du président..., que 2012.. que bling bling...Banco!!...

3.Posté par la verité sur la guerre coloniale en cours le 26/03/2011 08:50
La France préparait depuis novembre le renversement de Kadhafi
par Franco Bechis*

Selon le journaliste de la droite libérale italienne Franco Bechis, la révolte de Benghazi aurait été préparée depuis novembre 2010 par les services secrets français. Comme le remarque Miguel Martinez du site internet progressiste ComeDonChisciotte, ces révélations, encouragées par les services secrets italiens, doivent se comprendre comme une rivalité au sein du capitalisme européen.
Le Réseau Voltaire précise que Paris a rapidement associé Londres à son projet de renversement du colonel Kadhafi (force expéditionnaire franco-britannique). Ce plan a été modifié dans le contexte des révolutions arabes et pris en main par Washington qui a imposé ses propres objectifs (contre-révolution dans le monde arabe et débarquement de l’Africom sur le continent noir). La coalition actuelle est donc la résultante de ces ambitions distinctes, ce qui explique ses contradictions internes.

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24 mars 2011

Depuis
Rome (Italie)

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Pays
France
Libye

Thèmes
Action secrète


Première étape du voyage, 20 octobre 2010, Tunis. C’est là qu’est descendu avec toute sa famille d’un avion de Libyan Airlines, Nouri Mesmari, chef du protocole de la cour du colonel Muhamar Kadhafi. C’est un des grands perroquets du régime libyen, depuis toujours aux côtés du colonel.

Le seul -comprenons-nous- qui avec le ministre des Affaires étrangères Moussa Koussa avait un accès direct à la résidence du raïs sans avoir à frapper (avant d’entrer, NdT).

Le seul à pouvoir franchir le seuil de la suite 204 du vieux cercle officiel de Benghazi où le colonel libyen a accueilli avec tous les honneurs le Premier ministre italien Silvio Berlusconi pendant la visite officielle en Libye. Cette visite de Mesmari à Tunis ne dure que quelques heures. On ne sait pas qui il rencontre dans la capitale où la révolte contre Ben Ali couve sous la cendre. Mais il est désormais certain que dans ces heures-là et dans celles qui ont immédiatement suivi, Mesmari jette les ponts de ce qui, à la mi-février, allait devenir la rébellion de la Cyrénaïque. Et prépare l’estocade contre Kadhafi en cherchant et obtenant l’alliance sur deux fronts : le premier est celui de la dissidence tunisienne. Le second est celui de la France de Nicolas Sarkozy. Et les deux alliances lui réussissent.

C’est ce dont témoignent des documents de la DGSE, le service secret français, et une série de nouvelles fracassantes qui ont circulé dans les milieux diplomatiques français à partir de la lettre confidentielle, Maghreb Confidential (dont il existe une version synthétique et accessible payante).

Mesmari arrive à Paris le lendemain, 21 octobre. Et il n’en bougera plus. En Libye il n’a pas caché son voyage en France, puisqu’il a emmené avec lui toute sa famille. La version est qu’à Paris il doit subir un traitement médical et probablement une opération. Mais il ne verra pas l’ombre d’un médecin. Ceux qu’il verra seront par contre, tous les jours, des fonctionnaires des services secrets français.


L’ex compagnon de Kadhafi, Nouri Massoud El-Mesmari, a fait défection le 21 octobre 2010. Il vit aujourd’hui sous protection des services secrets français. La réunion. On a vu de façon certaine au début du mois de novembre, entrer à l’Hôtel Concorde Lafayette de Paris, où Mesmari réside, d’étroits collaborateurs du président français. Le 16 novembre, une file de voitures bleues est devant l’hôtel. Dense et longue réunion dans la suite de Mesmari. Deux jours plus tard une dense et étrange délégation française part pour Benghazi. Avec des fonctionnaires du ministère de l’Agriculture, des dirigeants de France Export Céréales et de France Agrimer, des managers de Soufflet, de Louis Dreyfus, de Glencore, de Cani Céréales, Cargill et Conagra.

Expédition commerciale, sur le papier, pour essayer d’obtenir à Benghazi justement de riches commandes libyennes. Mais se trouvent aussi dans le groupe des militaires français, déguisés en hommes d’affaire.

À Bengazi ils vont rencontrer un colonel de l’aéronautique libyenne indiqué par Mesmari : Abdallah Gehani. Il est au-dessus de tout soupçon, mais l’ex-chef du protocole de Kadhafi a révélé qu’il était prêt à déserter et qu’il a aussi de bons contacts avec la dissidence tunisienne.

L’opération est menée en grand secret, mais quelque chose filtre jusqu’aux hommes les plus proches de Kadhafi. Le colonel se doute de quelque chose. Le 28 novembre, il signe un mandat d’arrêt international à l’encontre de Mesmari. L’ordre arrive aussi en France à travers les canaux protocolaires. Les Français s’alarment et décident de suivre l’arrêt de façon formelle.

Quatre jours plus tard, le 2 décembre, la nouvelle filtre justement depuis Paris. On ne donne pas de nom mais on révèle que la police française a arrêté un des principaux collaborateurs de Kadhafi. La Libye, au premier abord, retrouve son calme. Puis apprend que Mesmari est en réalité aux arrêts domiciliaires dans la suite du Concorde Lafayette. Et le raïs commence à s’agiter.

La colère du raïs. Quand arrive la nouvelle que Mesmari a demandé officiellement l’asile politique à la France, la colère de Kadhafi éclate, il fait retirer son passeport même au ministre des Affaires étrangères, Moussa Koussa, accusé de responsabilité dans la défection de Mesmari. Il essaie ensuite d’envoyer ses hommes à Paris avec des messages pour le traître : « Reviens, tu seras pardonné ». Le 16 décembre, c’est Abdallah Mansour, chef de la télévision libyenne, qui essaie. Les Français l’arrêtent à l’entrée de l’hôtel. Le 23 décembre d’autres Libyens arrivent à Paris. Ce sont Farj Charrant, Fathi Boukhris et All Ounes Mansouri.

Nous les connaîtrons d’avantage après le 17 février : parce que ce sont justement eux, avec Al Hadji, qui vont mener la révolte de Benghazi contre les miliciens du colonel.

Les trois sont autorisés par les Français à sortir dîner avec Mesmari dans un élégant restaurant des Champs-Élysée. Il y a aussi là des fonctionnaires de l’Élysée et quelques dirigeants des services secrets français. Entre Noël et le Jour de l’an paraît dans Maghreb Confidential, la nouvelle que Benghazi est en ébullition (à ce moment-là personne ne le sait encore), et aussi quelques indiscrétions sur certaines aides logistiques et militaires qui seraient arrivées dans la seconde ville libyenne, en provenance justement de la France. Il est désormais clair que Mesmari est devenu un levier aux mains de Sarkozy pour faire sauter Kadhafi en Libye. La lettre confidentielle sur le Maghreb commence à faire filtrer les contenus de cette collaboration.

Mesmari est nommé « Libyan Wikileak », parce qu’il révèle un après l’autre les secrets de la défense militaire du colonel et raconte tous les détails des alliances diplomatiques et financières du régime, en décrivant même la carte du désaccord et les forces qui sont sur le terrain. À la mi-janvier, la France a dans les mains toutes les clés pour tenter de renverser le colonel. Mais il y a une fuite. Le 22 janvier, le chef des services secrets de Cyrénaïque, un fidèle du colonel, le général Aoudh Saaiti, arrête le colonel d’aviation Gehani, référant secret des Français depuis le 18 novembre.

Le 24 janvier, il est transféré dans une prison de Tripoli, accusé d’avoir créé un réseau social en Cyrénaïque, qui faisait les louanges de la contestation tunisienne contre Ben Ali. Mais c’est trop tard : Gehani a déjà préparé la révolte de Benghazi, avec les Français.



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